Prières et méditations
Le 2 Novembre 1912
Écoutez
Prière
Quoique tout mon être Te soit théoriquement
consacré, Ô Maître Sublime qui es la vie, la lumière
et l’amour de toute chose, j’ai peine encore à
appliquer cette consécration dans les détails. Il m’a
fallu plusieurs semaines pour savoir que la raison de
cette méditation écrite, sa légitimation, réside dans
le fait de Te l’adresser quotidiennement. Ainsi je
matérialiserai chaque jour un peu de la conversation
que j’ai si fréquemment avec Toi ; je Te ferai de mon
mieux ma confession ; non pas parce que je crois
pouvoir T’apprendre quelque chose : Tu es toute
chose ; mais notre façon extérieure et artificielle de
comprendre et de voir T’est étrangère, si je puis
dire ; elle est opposée à Ta nature. Cependant en me
tournant vers Toi, en me baignant dans Ta Lumière
au moment où je considère ces choses, petit à petit je
les verrai plus semblables à ce qu’elles sont. Jusqu’au
jour où, m’étant identifiée à Toi, je n’aurai plus rien à
Te dire puisque je serai Toi. C’est ce but que je veux
atteindre ; c’est vers cette victoire que tendront de
plus en plus tous mes efforts. Et j’aspire au jour où
je ne pourrai plus dire « je » parce que je serai Toi.
Que de fois par jour, encore, j’agis sans que mon
acte Te soit consacré ; je m’en aperçois tout de suite
à un malaise indéfinissable qui se traduit dans ma
sensibilité corporelle par un serrement de coeur.
J’objective alors mon action qui me paraît ridicule,
enfantine ou coupable ; je la déplore ; pour un moment
je suis triste, jusqu’à ce que me plongeant, me perdant
en Toi avec une confiance d’enfant, j’attende de Toi
l’inspiration et la force nécessaires pour réparer mon
erreur en moi et autour de moi, ce qui est tout un ;
car maintenant je perçois de façon constante et précise
l’unité universelle qui détermine une interdépendance
absolue de toutes les actions.
Écoutez | Prière |
Quoique tout mon être Te soit théoriquement
consacré, Ô Maître Sublime qui es la vie, la lumière
et l’amour de toute chose, j’ai peine encore à
appliquer cette consécration dans les détails. Il m’a
fallu plusieurs semaines pour savoir que la raison de
cette méditation écrite, sa légitimation, réside dans
le fait de Te l’adresser quotidiennement. Ainsi je
matérialiserai chaque jour un peu de la conversation
que j’ai si fréquemment avec Toi ; je Te ferai de mon
mieux ma confession ; non pas parce que je crois
pouvoir T’apprendre quelque chose : Tu es toute
chose ; mais notre façon extérieure et artificielle de
comprendre et de voir T’est étrangère, si je puis
dire ; elle est opposée à Ta nature. Cependant en me
tournant vers Toi, en me baignant dans Ta Lumière
au moment où je considère ces choses, petit à petit je
les verrai plus semblables à ce qu’elles sont. Jusqu’au
jour où, m’étant identifiée à Toi, je n’aurai plus rien à
Te dire puisque je serai Toi. C’est ce but que je veux
atteindre ; c’est vers cette victoire que tendront de
plus en plus tous mes efforts. Et j’aspire au jour où
je ne pourrai plus dire « je » parce que je serai Toi.
Que de fois par jour, encore, j’agis sans que mon
acte Te soit consacré ; je m’en aperçois tout de suite
à un malaise indéfinissable qui se traduit dans ma
sensibilité corporelle par un serrement de coeur.
J’objective alors mon action qui me paraît ridicule,
enfantine ou coupable ; je la déplore ; pour un moment
je suis triste, jusqu’à ce que me plongeant, me perdant
en Toi avec une confiance d’enfant, j’attende de Toi
l’inspiration et la force nécessaires pour réparer mon
erreur en moi et autour de moi, ce qui est tout un ;
car maintenant je perçois de façon constante et précise
l’unité universelle qui détermine une interdépendance
absolue de toutes les actions.
Le 19 Novembre 1912
Écoutez | Prière |
J’ai dit hier à ce jeune Anglais qui Te cherche avec un
si sincère désir, que je T’avais définitivement trouvé,
que l’Union était constante. Tel est, en effet, l’état
dont je suis consciente. Toutes mes pensées vont vers
Toi, tous mes actes Te sont consacrés ; Ta Présence est
pour moi un fait certain, immuable, invariable, et Ta
Paix habite mon coeur constamment. Pourtant je sais
que cet état d’Union est misérable et précaire à côté
de celui qu’il me sera possible de réaliser demain,
et que je suis loin encore, très loin sans doute,
de cette Identification où je perdrai totalement la
notion du « je », de ce « je » que j’emploie encore
pour m’exprimer, mais qui, à chaque fois, est une
gêne, comme un terme impropre à exprimer la pensée
qui veut s’exprimer. Il me semble indispensable par
nécessité de communication humaine, mais tout
réside dans ce que manifeste ce « je » ; et que de fois
déjà, quand je le prononce, c’est Toi qui parles en
moi, car j’ai perdu le sens de la séparativité.
.
Mais tout cela est embryonnaire encore et ira en se
perfectionnant. Quelle apaisante assurance que cette
sereine confiance en Ta Toute-Puissance !
.
Tu es tout, partout, en tout, et ce corps qui agit est
Ton propre corps ainsi que l’univers visible dans son
entier ; c’est Toi qui respires, qui penses et qui aimes
dans cette substance qui, étant Toi-même, veut être
Ta docile servante.
Le 26 Novembre 1912
Écoutez | Prière |
Quel cantique d’action de grâces ne devrais-je pas
Te chanter à chaque instant ! Partout et en toute
chose autour de moi Tu Te manifestes ; en moi Ta
conscience et Ta volonté s’expriment de plus en plus
clairement, au point que j’ai presque totalement perdu
cette grossière illusion du « moi » et du « mien ». Si
quelques ombres encore, quelques bavures se laissent
voir dans cette grande Lumière qui Te manifeste,
comment supporteront-elles longtemps l’éclat
merveilleux de Ton splendide Amour. Ce matin
la conscience que j’ai eue de ce que Tu fais de cet
être qui fut moi peut se traduire à peu près par un
monumental diamant taillé à facettes géométriques
et régulières ; diamant par la cohésion, la fermeté,
la limpidité incolore, la transparence, mais flamme
éclatante et radieuse dans sa vie intense et progressive.
Mais c’était plus et mieux que tout cela puisque toute
sensation extérieure ou intérieure était dépassée et
que cette image ne s’est présentée à mon mental qu’au
fur et à mesure que je rentrais en contact conscient
avec le monde extérieur.
C’est Toi qui rends l’expérience féconde, c’est Toi
qui fais que la vie est progressive, c’est Toi qui obliges
l’obscurité à se dissoudre instantanément devant la
Lumière, c’est Toi qui donnes toute sa puissance à
l’Amour, c’est Toi qui soulèves partout la matière
dans cette merveilleuse et ardente aspiration, dans
cette soif sublime d’Éternité.
Toi partout et toujours ; rien que Toi dans l’essence
et dans la manifestation …
Ombre, illusion, dissipez-vous ; souffrance,
évanouis-toi : Seigneur Suprême, n’es-Tu pas là !
Le 28 Novembre 1912
Écoutez | Prière |
La vie extérieure, l’activité de chaque jour et de chaque
instant n’est-elle pas le complément indispensable
des heures de méditation et de contemplation ? Et
la proportion de temps donné à l’une et à l’autre
n’est-elle pas l’image exacte de la proportion qui
existe entre la somme d’efforts à faire pour la
préparation et pour la réalisation ? Car la méditation,
la contemplation, l’Union, c’est le résultat obtenu, la
fleur qui s’épanouit ; tandis que l’activité quotidienne
est l’enclume sur laquelle doivent passer et repasser
tous les éléments afin qu’ils soient assouplis, purifiés,
raffinés, rendus mûrs pour l’illumination qui leur est
conférée par la contemplation. Et il faut que tous ces
éléments les uns après les autres soient ainsi passés
au creuset avant que l’activité extérieure ne soit plus
une nécessité pour le développement intégral. Cette
activité devient alors le moyen de Te manifester afin
d’éveiller d’autres centres de conscience au même
travail duel de forge et d’illumination. C’est pourquoi
l’orgueil et la satisfaction de soi sont les pires des
obstacles. C’est très modestement qu’il faut profiter
de toutes les minuscules occasions offertes de pétrir
et de purifier quelques-uns de ces innombrables
éléments, de les assouplir, de les impersonnaliser,
de leur apprendre l’oubli de soi, l’abnégation, le
dévouement, la bonté, la douceur ; et lorsque toutes
ces manières d’être leur sont coutumières, alors ils
sont prêts pour participer à la Contemplation et
s’identifier à Toi dans la Concentration suprême.
C’est pourquoi, même pour les meilleurs, le travail
me paraît devoir être long et lent ; et les conversions
foudroyantes me paraissent ne pas pouvoir être
intégrales. Elles changent l’orientation de l’être et le
mettent définitivement dans le chemin de la rectitude ;
mais pour atteindre vraiment le but, personne ne peut
échapper aux expériences innombrables, de toute
sorte et de tout instant.
… Ô Maître Suprême qui resplendis en mon être
et en toute chose, que Ta Lumière soit manifestée et
que le règne de Ta Paix vienne pour tous.
Le 2 Décembre 1912
Écoutez | Prière |
Tant qu’un élément de l’être, un mouvement de la pensée est soumis encore aux influences étrangères, c’est-à-dire n’est pas uniquement sous la Tienne, on ne peut pas dire que l’Union véritable est réalisée ; c’est encore l’affreux mélange sans ordre et sans lumière, car cet élément, ce mouvement est un monde, un monde de désordre et d’ombre, comme l’est la terre entière dans le monde matériel, comme l’est le monde matériel dans l’univers entier …
Le 3 Décembre 1912
Écoutez | Prière |
Hier soir j’ai fait l’expérience de l’efficacité de
l’abandon confiant à Ta direction : lorsqu’il est
nécessaire de savoir une chose on la sait, et plus l’être
mental est passif vis-à-vis de Ton Illumination, plus
l’expression se fait adéquate et claire.
Je T’écoutais parler en moi et j’aurais voulu que
ce que Tu disais pût être noté pour que la formule
si précise n’en soit pas perdue — car maintenant je
serais incapable de redire ce que Tu as dit. Puis j’ai
pensé que ce souci de conservation était encore un
injurieux manque de confiance à Ton égard, puisque
Tu peux faire de moi tout ce qu’il est nécessaire que
je sois et que dans la mesure où mon attitude Te laisse
agir sur moi et en moi, Ta Toute-Puissance n’a pas
de limites. Savoir qu’à tout instant ce qui doit être
est sûrement, aussi parfaitement qu’il est possible,
pour tous ceux qui savent Te voir en toute chose
et partout ! Plus de crainte, plus de trouble, plus
d’angoisse ; rien que la Sérénité parfaite, la Confiance
absolue, la Paix suprême sans un vacillement …
Le 5 Décembre 1912
Écoutez | Prière |
Dans la Paix et le Silence, l’Éternel se manifeste ; ne
permets à aucune chose de te troubler et l’Éternel
se manifestera ; sois parfaitement égal en face de
tout et l’Éternel sera là … Oui, il ne faut pas mettre
trop d’intensité ni trop d’efforts à Te chercher ; cette
intensité et ces efforts sont un voile devant Toi ; il
ne faut pas désirer Te voir, c’est encore de l’agitation
mentale qui obscurcit Ton Éternelle Présence. C’est
dans la Paix, la Sérénité, l’Égalité la plus complète
que tout est Toi comme Tu es tout, et la moindre
vibration dans cette atmosphère parfaitement pure
et calme est un obstacle à Ta manifestation. Pas de
hâte, pas d’inquiétude, pas de tension ; Toi, rien que
Toi, sans analyse ni objectivation, et Tu es là sans
aucun doute possible, car tout devient Paix Sainte
et Silence Sacré.
Et cela est mieux que toutes les méditations du
monde.
Le 7 Décembre 1912
Écoutez | Prière |
Comme une flamme qui brûle silencieusement,
comme un parfum qui monte tout droit, sans vaciller,
mon amour va vers Toi ; et comme l’enfant qui ne
raisonne pas et ne s’inquiète de rien, je me confie à
Toi pour que Ta Volonté soit faite, que Ta Lumière
se manifeste, que Ta Paix rayonne et que Ton Amour
couvre le monde. Quand Tu le voudras je serai en
Toi, Toi-même, sans aucune distinction ; et j’attends
cette heure bénie sans impatience d’aucune sorte, en
me laissant couler irrésistiblement vers elle comme le
fleuve paisible coule vers l’océan sans bornes.
Ta Paix est en moi et dans cette Paix je ne vois
plus que Toi présent en toute chose, avec le calme
de l’Éternité.
Le 10 Décembre 1912
Écoutez | Prière |
Ô Maître Suprême, Instructeur Éternel, il m’a été
donné, une fois de plus, de constater l’efficacité sans
pareille de la pleine confiance en Ta direction. Ta
Lumière s’est manifestée hier par ma bouche sans
rencontrer en moi de résistance ; l’instrument fut
docile, souple et bien aiguisé.
C’est Toi qui agis en toute chose et en tout être,
et celui qui est assez proche de Toi pour Te voir en
tout acte sans exception, sait transformer tout acte
en bénédiction.
Être en Toi toujours est la seule chose importante,
en Toi toujours et toujours plus, en dehors des
illusions et des sensations mensongères, et non pas
en se retirant des actes, en les refusant, en les rejetant
— combat inutile et néfaste — mais en ne vivant que
Toi dans l’acte quel qu’il soit, toujours et toujours ;
alors l’illusion se dissipe, la sensation fausse s’évanouit,
le lien des conséquences tombe et tout se transforme
en une glorification de Ta Présence Éternelle.
Ainsi soit-il.
Le 11 Décembre 1912
Écoutez | Prière |
…J’attends, sans hâte et sans inquiétude, qu’un
nouveau voile se déchire et que l’Union se fasse
plus complète. Je sais que ce voile est fait de tout
un ensemble de petites imperfections, de liens sans
nombre... Comment disparaîtra cet ensemble ?
Lentement, à l’aide d’innombrables petits efforts
et d’une vigilance qui ne doit pas se démentir
un moment, ou tout d’un coup, par une grande
illumination de Ton Amour Tout-Puissant ? Je ne
sais, et ne me pose même pas la question ; j’attends,
en veillant de mon mieux à tout, mais certaine que
seule Ta Volonté existe, que Toi seul agis et que je suis
l’instrument ; et quand l’instrument sera prêt pour
une plus complète manifestation, la manifestation
aura lieu, tout naturellement.
Derrière le voile s’entend déjà la silencieuse
symphonie d’allégresse révélant Ta Sublime
Présence.
Année : 1913
Le 5 Février 1913
Écoutez | Prière |
Comme un chant mélodieux, Ta voix se fait entendre
dans le silence de mon coeur ; et dans mon cerveau il
se traduit par des mots imparfaits qui sont pourtant
encore tout imprégnés de Toi. Et ces mots s’adressent
à la Terre et lui disent : Pauvre Terre douloureuse,
souviens-toi que Je suis présent en toi et ne perds
pas l’espoir ; chaque effort, chaque souffrance,
chaque allégresse et chaque angoisse, chaque appel
de ton coeur, chaque aspiration de ton âme, chaque
renouveau de tes saisons, tout, tout sans exception, ce
qui te paraît triste comme ce qui te paraît joyeux, ce
qui te paraît laid comme ce qui te parait beau, tout te
mène vers Moi infailliblement, et Je suis la Paix sans
fin, la Lumière sans ombre, l’Harmonie parfaite, la
Certitude, le Repos et la Bénédiction Suprême.
Écoute, ô terre, la voix sublime qui s’élève.
Écoute et reprends courage.
Le 8 Février 1913
Écoutez | Prière |
Seigneur, Tu es mon refuge et ma bénédiction, ma
force, ma santé, mon espoir et mon courage. Tu es
la Paix suprême, la Joie sans mélange, la parfaite
Sérénité. Tout mon être est prosterné devant Toi dans
une infinie gratitude et une incessante adoration ; et
cette adoration monte vers Toi de mon coeur et de
mon esprit comme monte la pure fumée des parfums
de l’Inde.
Permets-moi d’être Ton annonciatrice auprès des
hommes, afin que tous ceux qui sont prêts puissent
goûter les béatitudes que Tu m’octroies dans Ton
infinie Miséricorde, et que Ta Paix règne sur la
terre.
Le 10 Février 1913
Écoutez | Prière |
Mon être monte vers Toi en action de grâces, non
parce que Tu Te sers de ce faible corps imparfait
pour Te manifester, mais parce que Tu Te manifestes,
et cela c’est la Splendeur des splendeurs, la Joie des
joies, la Merveille des merveilles. Tous ceux qui Te
recherchent avec ardeur devraient comprendre que
Tu es là quand il est nécessaire que Tu y sois ; et
s’ils faisaient cet acte de foi suprême de ne plus Te
chercher mais de T’attendre en se mettant à chaque
instant et intégralement à Ton service, dès que ce
serait nécessaire Tu serais là ; et n’est-ce pas toujours
nécessaire que Tu sois là, quelles que soient d’ailleurs
les formes diverses, souvent inattendues, de Ta
manifestation ?
Que Ta gloire soit proclamée,
Que la vie en soit sanctifiée,
Que les coeurs en soient transformés,
Et que Ta Paix règne sur la terre.
Le 12 Février 1913
Écoutez | Prière |
Dès que tout effort disparaît d’une manifestation,
elle devient très simple, de la simplicité d’une fleur
qui s’épanouit et qui manifeste sa beauté et répand
son parfum sans éclats de voix ni gestes violents. Et
c’est dans cette simplicité que réside la plus grande
puissance, celle qui contient le minimum de mélange
et qui donne lieu au minimum de réactions funestes.
Il faut se méfier du pouvoir vital, c’est un tentateur
placé sur le chemin de l’oeuvre, et l’on risque toujours
de tomber dans son piège, car il vous fait apprécier
des résultats immédiats ; et dans l’ardeur que l’on met
tout d’abord à bien faire, on se laisse entraîner à se
servir de cette puissance. Mais bien vite elle fait dévier
toute l’action, elle introduit un germe d’illusion et
de mort dans ce que l’on fait.
Simplicité, simplicité ! Comme est douce la pureté
de ta présence …
Le 11 Mai 1913
Écoutez | Prière |
Dès que je n’ai plus de responsabilités matérielles,
toutes les pensées concernant ces choses s’enfuient loin
de moi, et je me trouve uniquement et complètement
préoccupée de Toi et de Ton service. Alors, dans la
paix et la sérénité parfaites, j’unis ma volonté à la
Tienne, et dans le silence intégral j’écoute l’expression
de Ta Vérité.
C’est en prenant conscience de Ta Volonté et en
identifiant la nôtre à la Tienne que se trouve le secret
de la liberté véritable et de la toute-puissance, le secret
de la régénération des forces et de la transfiguration
de l’être.
Être en accord intégral et constant avec Toi, c’est
avoir la certitude de vaincre tous les obstacles, de
triompher de toutes les difficultés intérieures et
extérieures.
Seigneur, Seigneur, la joie sans bornes emplit mon
coeur, les hymnes d’allégresse roulent dans ma tête
leurs ondes merveilleuses, et dans la pleine confiance
de Ton triomphe certain, je trouve la paix souveraine
et la puissance invincible. Tu remplis mon être, Tu
l’animes, Tu fais mouvoir ses ressorts cachés, Tu
illumines sa compréhension, Tu intensifies sa vie,
Tu décuples son amour ; et je ne sais plus si je suis
l’univers ou si l’univers est moi, si Tu es en moi ou
si je suis en Toi ; Toi seul existes et tout est Toi ; et
les flots de Ta grâce infinie remplissent et débordent
le monde.
Chantez terres, chantez peuples, chantez hommes,
La Divine Harmonie est là.
Le 18 Juin 1913
Écoutez | Prière |
Se tourner vers Toi, s’unir à Toi, vivre en Toi et pour Toi, c’est le bonheur suprême, la joie sans mélange, la paix immuable ; c’est respirer l’infini, planer dans l’éternité, ne plus sentir ses limites, échapper au temps et à l’espace. Pourquoi les hommes fuient-ils ces bienfaits comme s’ils en avaient peur ? Quelle étrange chose que l’ignorance, cette source de toutes les souffrances ! Quelle misère que cette obscurité qui éloigne les hommes de ce qui ferait justement leur bonheur et qui les assujettit à cette douloureuse école de l’existence ordinaire toute faite de luttes et de souffrances !
Le 21 Juillet 1913
Écoutez | Prière |
… Mais que de patience il faut ! Comme les progrès
sont imperceptibles ! …
Oh ! comme je T’appelle du plus profond de mon
coeur, Lumière Véritable, Amour Sublime, Divin
Maître qui nous animes et nous éclaires, qui nous
guides et nous protèges, qui es l’Âme de notre âme
et la Vie de notre vie, qui es la Raison d’être de notre
être, la Connaissance suprême et la Paix immuable !
Le 28 Novembre 1913
Écoutez | Prière |
Dans ce calme recueillement qui précède le lever
du jour, mieux qu’à tout autre moment, ma pensée
monte vers Toi, Seigneur de notre être, dans une
ardente prière.
Que ce jour qui va commencer apporte à la terre et
aux hommes un peu plus de pure lumière et de paix
véritable ; que Ta manifestation soit plus complète
et Ta douce loi plus reconnue ; que quelque chose
de plus haut, de plus noble, de plus vrai soit révélé à
l’humanité ; qu’un amour plus vaste et plus profond se
répande afin que les plaies douloureuses se cicatrisent ;
et que ce premier rayon de soleil qui va poindre soit
l’annonciateur de joies et d’harmonies, le symbole
de la glorieuse splendeur cachée dans l’essence de
la vie.
Ô Divin Maître, permets que ce jour soit pour
nous l’occasion d’une consécration plus complète à Ta
loi, d’un don plus intégral à Ton oeuvre, d’un oubli
plus total de soi, d’une illumination plus grande,
d’un amour plus pur ; permets qu’en une communion
toujours plus profonde et constante avec Toi, nous
nous unissions toujours mieux pour être Tes dignes
serviteurs. Écarte de nous tout égoïsme et tout
mesquin orgueil, toute convoitise et toute obscurité,
afin qu’entièrement embrasés de Ton divin amour,
nous soyons Tes flambeaux dans le monde.
Un silencieux cantique monte de mon coeur comme
la blanche fumée des parfums d’Orient.
Et avec la sérénité du parfait abandon, je Te salue
dans le jour qui se lève !
Année : 1914
Le 24 Janvier 1914
Écoutez | Prière |
Ô Toi unique réalité de notre être, Toi, sublime Maître d’amour, rédempteur de la vie, laisse-moi n’avoir plus conscience que de Toi seul, à chaque instant et en toute chose. Quand je ne vis plus uniquement de Ta vie, j’agonise, je m’éteins lentement car Tu es ma seule raison d’être, mon seul but, mon seul soutien. Je suis comme l’oiseau timide, qui n’est pas sûr encore de ses ailes et hésite à s’envoler ; laisse-moi prendre mon essor pour m’identifier définitivement à Toi.
Le 1er Février 1914
Écoutez | Prière |
Je me tourne vers Toi qui es partout et en tout
et hors de tout, l’essence de tout et étranger à tout,
centre condensateur de toutes les énergies, créateur
des individualités conscientes ; je me tourne vers Toi
et Te salue libérateur des mondes, et identifiée à Ton
amour divin, je considère la terre et les êtres, cette
masse de substance mise en formes perpétuellement
détruites et renouvelées, cette masse grouillante
d’agrégats aussitôt dissous que constitués, d’êtres
qui s’imaginent être des individualités conscientes et
durables et qui sont aussi éphémères qu’un souffle,
toujours semblables ou à peu près, dans leur diversité,
répétant indéfiniment les mêmes désirs, les mêmes
tendances, les mêmes appétits, les mêmes ignorantes
erreurs.
Mais de temps en temps Ta sublime lumière
resplendit dans un être et rayonne à travers lui sur
le monde, et alors un peu de sagesse, un peu de
connaissance, un peu de foi désintéressée, d’héroïsme
et de compassion, pénètre les coeurs, transforme
les cerveaux et délivre quelques éléments de cette
douloureuse et implacable roue de l’existence à
laquelle leur aveugle ignorance les soumet.
Mais quelle splendeur plus haute que toutes
celles qui ont précédé, quelle merveille de gloire et
de lumière ne faudrait-il pas pour tirer les êtres de
l’horrible aberration où les plonge la vie des cités
et des prétendues civilisations ! Quelle puissance
formidable et divinement douce à la fois ne faudrait-il
pas pour détourner toutes ces volontés de l’âpre lutte
pour leurs satisfactions égoïstes, mesquines et sottes,
pour les arracher à ce tourbillon qui recèle la mort
dans son scintillement trompeur, et pour les tourner
vers Ton harmonieuse conquête !
Seigneur, Maître éternel, éclaire-nous, guide nos
pas, montre-nous la voie vers la réalisation de Ta loi,
vers l’accomplissement de Ton oeuvre.
Je T’adore en silence et T’écoute dans un religieux
recueillement.
Le 14 Février 1914
Écoutez | Prière |
Paix, paix sur toute la terre …
Que tous, échappant à la conscience ordinaire,
délivrés de l’attachement pour les choses matérielles,
s’éveillent à la connaissance de Ta divine présence,
unissent leur conscience à Ta conscience suprême, et
goûtent la plénitude de paix qui en résulte.
Seigneur, Tu es le souverain Maître de notre être,
Ta loi est notre loi ; et de toute notre force nous
aspirons à identifier notre conscience à Ton éternelle
conscience, afin d’accomplir Ton oeuvre sublime en
toute chose et à chaque instant.
Seigneur, délivre-nous du souci des contingences,
délivre-nous de la perception vulgaire, permets que
nous ne voyions plus que par Tes yeux et que nous
n’agissions plus que par Ta volonté ; transforme-nous
en vivants flambeaux de Ton amour divin.
Avec vénération, avec dévotion, dans une joyeuse
consécration de tout mon être, je me donne, Seigneur,
à l’accomplissement de Ta loi.
Paix, paix sur toute la terre …
Le 15 Février 1914
Écoutez | Prière |
Seigneur, Unique Réalité, Lumière de la lumière et Vie
de la vie, Amour suprême sauveur du monde, permets
que de plus en plus nous soyons parfaitement éveillés
à la conscience de Ta constante Présence, afin que
tous nos actes soient conformes à Ta loi et qu’il n’y ait
aucune différence entre notre volonté et Ta volonté.
Nous voulons nous dégager de la conscience illusoire,
du monde de la fantasmagorie, pour identifier notre
conscience à l’absolue Conscience qui est Toi.
Donne-nous la constance dans la volonté d’atteindre
le but, la fermeté, l’énergie et ce courage qui secoue
toute torpeur et toute lassitude.
Seigneur, je T’implore, permets que tout en mon
être s’identifie à Toi et que je ne sois plus qu’un
flambeau d’amour complètement éveillé à Ton activité
suprême.
À bord du Kaga Maru, le 7 Mars 1914
Écoutez | Prière |
Tu fus avec nous hier comme la plus merveilleuse des
protections ; Tu permis que Ta loi puisse triompher
jusque dans la manifestation la plus extérieure. À la
violence il a été répondu par le calme, à la brutalité par
la force de la douceur ; et là où aurait pu prendre place
un irréparable malheur, Ta puissance a été glorifiée.
Ô Seigneur ! avec quelle fervente reconnaissance j’ai
salué Ta présence. Ce fut pour moi le signe certain
que nous aurions la force d’agir, de penser, de vivre
en Ton nom et pour Toi ; non pas seulement dans
l’intention et la volonté, mais effectivement, dans la
réalisation intégrale.
Ce matin ma prière monte vers Toi dans une
aspiration toujours identique : vivre Ton amour,
rayonner Ton amour si puissamment, si efficacement
que tous se sentent fortifiés, régénérés, illuminés à
notre contact. Pouvoir guérir les maux, soulager les
souffrances, faire naître la paix et la calme confiance,
effacer les angoisses et les remplacer par la perception
du bonheur véritable, celui qui réside en Toi et qui ne
s’éteint jamais… Ô Seigneur, merveilleux Ami, Maître
tout-puissant, pénètre tout notre être et transfigure-le
afin que Toi seul vives en nous et par nous !
Le 8 Mars 1914
Écoutez | Prière |
Devant ce calme lever de soleil qui rendait tout
paisible et silencieux intérieurement, au moment
où, prenant conscience de Toi, Toi seul vivais en
moi, Seigneur, il m’a semblé que j’adoptais tous les
habitants de ce bateau, que je les enveloppais tous
dans un égal amour, et qu’ainsi en chacun d’eux
quelque chose de Ta conscience s’éveillerait. Rarement
j’avais si bien senti Ta divine puissance, Ta lumière
invincible ; et une fois de plus ma confiance fut totale
et mon joyeux abandon sans mélange.
Ô Toi qui soulages toutes les souffrances et dissipes
toutes les ignorances, Toi le guérisseur suprême, sois
constamment présent sur ce navire dans le coeur de
tous ceux qu’il abrite, afin qu’une fois de plus Ta
gloire soit manifestée.
Le 9 Mars 1914
Écoutez | Prière |
Ceux qui vivent pour Toi et en Toi peuvent
changer d’entourage physique, d’habitudes, de
climat, de milieu, partout ils retrouvent la même
atmosphère, celle qu’ils portent en eux, dans leur
pensée constamment attachée sur Toi, et partout ils
se sentent chez eux, c’est-à-dire chez Toi. Il n’est plus
pour eux de ces émerveillements devant la nouveauté
des choses et des pays, leur imprévu, leur pittoresque ;
en tout Ta Présence pour eux est évidente et Ta
splendeur immuable ne les quittant pas leur apparaît
dans le moindre grain de sable. Toute la terre chante
Tes louanges ; malgré les obscurités, les misères, les
ignorances, à travers tout cela, c’est encore Ta gloire
d’amour qu’on aperçoit et avec laquelle on peut sans
cesse et partout communier.
Seigneur, mon doux Maître, tout cela je l’éprouve
d’une façon constante sur ce bateau qui me paraît
un lieu de paix merveilleux, un temple naviguant en
Ton honneur sur les flots de la passivité subconsciente
qu’il nous faut conquérir et éveiller à la conscience
de Ta divine Présence.
Béni soit le jour où je T’ai connue, ineffable
Éternité !
Béni entre tous soit le jour où la Terre, enfin
éveillée, Te connaîtra et ne vivra plus que pour Toi !
Le 25 Mars 1914
Écoutez | Prière |
Comme toujours, invisible et silencieuse mais toutepuissante,
Ton action s’est exercée, et dans ces âmes
qui semblaient si closes, la perception de Ta divine
lumière s’est éveillée. Je savais qu’il est impossible
que l’on puisse solliciter Ta Présence en vain, et que
si, dans la sincérité de son coeur, on communie avec
Toi à travers n’importe quel organisme, corps ou
collectivité humaine, cet organisme s’en trouve, malgré
son ignorance, son inconscience, tout transformé.
Mais quand cette transformation devient consciente
dans un ou plusieurs éléments, quand la flamme qui
couvait sous la cendre jaillit tout d’un coup illuminant
tout l’être, alors on est heureux de pouvoir saluer Ton
action souveraine, de constater une fois de plus Ta
puissance invincible, d’espérer légitimement qu’une
possibilité nouvelle de bonheur véritable est venue
s’ajouter aux autres dans l’humanité.
Seigneur, ma reconnaissance fervente monte vers
Toi, exprimant la gratitude de cette douloureuse
humanité que Tu illumines, transfigures, glorifies, à
qui Tu donnes la paix de la connaissance.
Le 10 Avril 1914
Écoutez | Prière |
Soudainement le voile s’est déchiré, l’horizon s’est
découvert. Devant la claire vision, tout mon être s’est
jeté à Tes pieds dans un grand élan de gratitude. Et
malgré cette profonde et intégrale joie, tout fut calme
et paisible, de cette paix de l’éternité. Il me semble
ne plus avoir de limites ; je n’ai plus la perception
du corps, ni des sensations, ni des sentiments, ni des
pensées… Une immensité claire, pure, tranquille,
tout imprégnée d’amour et de lumière, pleine d’une
béatitude indicible, est la seule chose qui me paraisse
actuellement être moi ; et ce moi est si peu le moi
d’autrefois, égoïste et limité, que je ne puis plus dire
si c’est moi ou bien Toi, Seigneur, Maître sublime
de nos destinées.
C’est comme si tout était énergie, courage,
force, volonté, douceur infinie, compassion sans
pareille…
Plus fortement encore que les jours derniers tout
le passé est mort, comme enseveli sous les rayons
de la vie nouvelle. Le dernier regard que je viens
de jeter en arrière, en relisant quelques pages de
ce cahier, m’a convaincue définitivement de cette
mort, et, c’est allégée d’un grand poids, que je me
présente devant Toi, ô mon divin Maître, avec toute la
simplicité, toute la nudité d’un enfant… Et toujours
la seule chose que je perçoive est cette pure et calme
immensité… Seigneur, Tu as répondu à ma prière et
Tu m’as accordé ce que je T’ai demandé : le « je » a
disparu, il n’y a plus que l’instrument docile mis à Ton
service, centre de concentration et de manifestation
de Tes rayons infinis et éternels. Tu as pris ma vie et
l’as faite Tienne, Tu as pris ma volonté et l’as unie à
la Tienne, Tu as pris mon amour et Tu l’as identifié
au Tien, Tu as pris ma pensée et Tu l’as remplacée
par Ta Conscience absolue.
Le corps émerveillé courbe le front dans la poussière
en muette et soumise adoration. Et plus rien n’existe
que Toi dans la splendeur de Ta paix immuable.
Pondichéry, le 17 Avril 1914
Écoutez | Prière |
Ô Seigneur, Maître tout-puissant, Unique Réalité,
permets qu’aucune erreur, aucune obscurité, aucune
fatale ignorance ne se glissent dans mon coeur et ma
pensée…
Dans l’action, la personnalité est l’intermédiaire
inévitable, indispensable, de Ta volonté et de Tes
forces. Plus cette personnalité est forte, complexe,
puissante, individualisée, consciente, plus l’instrument
peut être puissamment et utilement employé. Mais,
à cause même de son caractère de personnalité, elle
a facilement tendance à entrer dans l’illusion funeste
de son existence séparée, et de devenir peu à peu
un écran entre Toi et ce sur quoi Tu veux agir ; non
pas au début dans la manifestation, mais dans la
transmission du retour ; c’est-à-dire qu’au lieu d’être,
en serviteur fidèle, un intermédiaire Te rapportant
exactement ce qui T’est dû — les forces émises
répondant à Ton action — la personnalité a tendance
à vouloir conserver pour elle-même une partie de ces
forces avec l’idée : « c’est moi qui ai fait ceci ou cela,
c’est moi que l’on remercie… » Pernicieuse illusion,
obscur mensonge, maintenant vous êtes découverts et
démasqués. Voilà le ver malfaisant qui ronge le fruit
de l’action et fausse tous les résultats.
Ô Seigneur, mon doux Maître, Unique Réalité,
dissipe ce sentiment du moi. Maintenant j’ai compris
que tant qu’il y aura un univers manifesté le moi sera
nécessaire à Ta manifestation ; dissiper ou seulement
diminuer, affaiblir le moi, c’est Te priver de Ton moyen
de manifestation, totalement ou en partie. Mais ce
qu’il faut supprimer radicalement, définitivement,
c’est l’illusoire pensée, l’illusoire sentiment, l’illusoire
sensation du moi séparé. À aucun moment, en aucune
circonstance, il ne faut oublier que ce moi n’a aucune
réalité hors de Toi.
Ô mon doux Maître, divin Seigneur, arrache de
mon coeur cette illusion afin que ce serviteur devienne
pur et Te rapporte fidèlement et intégralement tout ce
qui T’est dû. Laisse-moi dans le silence contempler et
comprendre cette suprême ignorance et la dissoudre
à tout jamais ; chasse l’ombre de ce coeur et que Ta
lumière y règne en souveraine incontestée.
Le 12 Mai 1914
Écoutez | Prière |
De plus en plus il me semble que nous sommes
dans une de ces périodes d’activité où le fruit des
efforts passés se manifeste ; une de ces périodes où
l’on agit selon Ta loi et dans la mesure où elle est la
souveraine maîtresse de l’être, sans avoir même le
loisir de prendre conscience de cette loi.
Ce matin, par une rapide expérience, passant de
profondeur en profondeur, j’ai pu comme à l’ordinaire
identifier ma conscience à la Tienne et ne plus vivre
qu’en Toi ; c’est-à-dire que Toi seul vivais ; mais Ta
volonté a immédiatement tiré ma conscience vers
l’extérieur, vers l’oeuvre à accomplir, et Tu m’as dit :
« S ois l’instrument dont j’ai besoin ».
Et n’est-ce point ainsi le dernier renoncement, le
renoncement à l’identification avec Toi, à la douce et
pure joie de ne plus faire de distinction entre Toi et
moi, de savoir à chaque minute, non pas seulement
intellectuellement, mais par une expérience intégrale,
que Tu es l’unique Réalité et que tout le reste n’est
qu’apparence et illusion. Que l’être extérieur soit
l’instrument docile qui n’a même pas besoin d’être
conscient de la volonté qui le meut, cela n’est pas
douteux ; mais pourquoi faut-il que je sois presque
entièrement identifiée à cet instrument, au lieu que
le « je » ne fasse plus qu’un avec Toi et vive de Ta
pleine, absolue Conscience ?
Je le demande, mais je ne m’en inquiète pas.
Je sais que tout est selon Ta volonté, et avec une
pure adoration, je m’en remets joyeusement à Ta
volonté ; ce que Tu voudras de moi, Seigneur, je le
serai, consciente ou inconsciente, simple instrument
comme est le corps, ou Connaissance Suprême comme
Toi-même.
Oh la douce et paisible joie de pouvoir dire
« tout est bien », et de Te sentir à l’oeuvre dans le
monde à travers tous les éléments qui se prêtent à la
transmission.
Tu es le souverain Maître de tout, Tu es l’Inaccessible,
l’Inconnaissable, l’éternelle et sublime Réalité.
Ô merveilleuse Unité, je disparais en Toi !…
Le 21 Mai 1914
Écoutez | Prière |
de l’éternité, je suis en Toi, Seigneur, immobile
béatitude. Dans ce qui, de Ta puissance, de Ta
lumière merveilleuse, forme le centre et la réalité
des atomes matériels, je Te retrouve ; et ainsi, sans
quitter Ta divine Présence, je puis disparaître dans Ta
Conscience suprême, ou Te voir dans les particules
radiantes de mon être. Et pour le moment cela est la
plénitude de Ta vie et de Ton illumination.
Je Te vois, je Te suis, et entre ces deux extrêmes
mon intense amour aspire vers Toi.
Le 22 Mai 1914
Écoutez | Prière |
Après avoir discerné successivement dans tous les
états de l’être et tous les mondes de la vie ce qui
est Réel de ce qui est irréel, après être arrivé à la
parfaite et intégrale certitude de Ton Unique Réalité,
il faut, du haut de cette Conscience Suprême, tourner
son regard vers l’agrégat individuel qui sert d’actuel
instrument à Ta manifestation sur terre et ne plus
voir en lui que Toi, son unique existence réelle. Ainsi
chaque atome de cet agrégat sera éveillé à la réceptivité
de Ta sublime influence et l’ignorance, les ténèbres
disparaîtront non seulement de la conscience centrale
de l’être mais aussi de son mode d’expression le plus
extérieur. C’est seulement par l’accomplissement et
le perfectionnement de ce travail de transfiguration
que la plénitude de Ta Puissance, de Ta Lumière et
de Ton Amour pourra être manifestée.
Seigneur, cela Tu me le fais comprendre de plus
en plus clairement ; conduis-moi pas à pas sur ce
chemin. Tout mon être jusque dans son moindre
atome aspire à la parfaite connaissance de Ta
Présence, à la complète communion avec Elle. Que
tout obstacle disparaisse et que Ton divin savoir
remplace en tout lieu les ténèbres de l’ignorance.
Illumine cette ultime substance, comme Tu as
illuminé la conscience centrale, la volonté de l’être.
Et que l’individualité intégrale depuis sa première
origine, son essence, jusqu’à son ultime projection,
son corps le plus matériel, ne fasse plus qu’un dans
la parfaite réalisation, la complète manifestation de
Ton Unique Réalité.
Rien n’est dans l’univers que Ta vie, Ta Lumière,
Ton Amour.
Que tout resplendisse et soit transfiguré par la
Connaissance de la Vérité !
Ton divin amour inonde mon être ; Ta suprême
lumière resplendit dans chaque cellule ; tout exulte
de Te connaître et d’être Toi.
Le 26 Mai 1914
Écoutez | Prière |
Sur la surface est l’orage, la mer est démontée, les
vagues se choquent, s’escaladent, se brisent l’une
sur l’autre avec grand fracas, et tout le temps, sous
cette eau en furie les vastes étendues sont immobiles,
paisibles, souriantes ; elles regardent l’agitation de la
surface comme une action indispensable : il faut que
la matière soit rigoureusement barattée pour devenir
capable de manifester pleinement la divine Lumière.
Derrière les apparences troublées, derrière la lutte
et l’angoissant conflit, la conscience reste ferme à
son poste, observant tous les mouvements de l’être
extérieur, n’intervenant que pour rectifier la direction,
la position, pour ne pas laisser le jeu devenir trop
dramatique. Et cette intervention est tantôt ferme,
un peu sévère, tantôt ironique, un rappel à l’ordre
ou une moquerie toute pleine toujours de cette forte,
douce, paisible et souriante bienveillance.
Dans le silence je vis Ton infinie et éternelle
Béatitude.
Puis doucement la prière monte vers Toi de ce qui
est encore dans l’ombre et le conflit : Ô doux Maître,
Suprême Illuminateur, Suprême Purificateur, permets
que toute substance et toute activité ne soient plus
que la constante manifestation de Ton divin Amour
et de Ta Sérénité souveraine.
Et dans le coeur chante l’allégresse de Ta sublime
magnificence.
Le 27 Août 1914
Écoutez | Prière |
Être l’amour divin puissant, infini, insondable, dans
toutes les activités et tous les mondes de l’être… c’est
cela que j’implore de Toi, Seigneur ; permets que je
sois consumée de cet amour divin puissant, infini,
insondable dans toutes les activités et tous les mondes
de l’être ; transforme-moi en ce brasier ardent, afin
que l’atmosphère terrestre en soit purifiée.
Oh être Ton Amour infiniment…
Le 31 Août 1914
Écoutez | Prière |
Dans ce formidable désarroi et cette terrible
destruction, on peut voir la grande oeuvre de labour
nécessaire, préparant la terre pour une semence
nouvelle, celle qui se lèvera en épis merveilleux et
donnera au monde la splendide moisson de la race
nouvelle… La vision est claire et précise, le chemin
de Ta divine loi est si nettement tracé que la paix est
revenue s’installer en souveraine dans le coeur des
travailleurs : plus de doutes et plus d’hésitations, plus
d’angoisses et d’impatiences ; c’est la grande ligne
toute droite de l’oeuvre qui s’accomplit éternellement,
envers et contre tout, en dépit de toutes les apparences
contraires, malgré tous les illusoires détours. Et ces
individualités physiques, minutes insaisissables dans
l’infini devenir, savent qu’elles auront fait faire un pas
de plus à l’humanité, immanquablement et sans souci
pour les résultats inévitables, quels que puissent être
les résultats apparents et momentanés. Ils s’unissent
à Toi, ô Maître éternel, ils s’unissent à Toi, ô Mère
universelle, et dans cette double identification avec
Ce qui est au-delà de toute manifestation et Ce qui
est toute la manifestation, ils goûtent la joie infinie
de la parfaite Certitude…
Paix, paix, paix, dans tout l’univers…
La guerre n’est qu’une apparence,
Le trouble n’est qu’une illusion :
La paix est là immuablement.
Ô Mère, douce Mère que je suis, Tu es à la fois ce
qui détruit et ce qui érige.
L’univers entier vit dans Ton sein de sa vie
innombrable et Tu vis dans le moindre de ses atomes
immensément.
Et l’aspiration de Ton infinitude se tourne vers Cela
qui n’est point manifesté, afin d’implorer toujours
une plus complète et plus parfaite manifestation.
Et tout EST , en même temps, dans une triple et
clairvoyante, dans une totale Conscience, l’Individuel,
l’Universel, l’Infini.
Le 1er Septembre 1914
Écoutez | Prière |
Ô divine Mère, avec quelle ferveur, quel ardent amour, je suis allée vers Toi dans Ta conscience la plus profonde, dans Ton état de sublime amour et de félicité parfaite, et je me suis blottie si étroitement dans Tes bras, T’aimant d’un si intense amour, que je suis devenue Toi définitivement ; alors une voix plus profonde encore s’est fait entendre dans le silence de « notre » muette extase et cette voix a dit : « T ournetoi vers tous ceux qui ont besoin de Ton amour ». Et tout l’échelonnement des consciences, des mondes successifs est apparu ; les uns étaient splendides et lumineux, ordonnés et clairs ; la Connaissance était là resplendissante, l’Expression harmonieuse et vaste, la Volonté puissante et invincible ; puis les mondes s’obscurcissaient dans une multiplicité de plus en plus chaotique ; l’Énergie devenait violente et le monde matériel obscur et douloureux. Et quand dans notre amour infini nous avons perçu intégralement l’horrible souffrance du monde de l’ignorance et de la misère, lorsque « nous » avons vu nos enfants engagés dans un sombre conflit, jetés les uns sur les autres par des énergies dévoyées de leur but réel, « nous » avons voulu ardemment que la lumière du divin amour soit manifestée, transfiguratrice, au centre de ces éléments affolés… Alors, pour que la Volonté soit plus puissante encore et plus effective, « nous » nous sommes tournées vers Toi, Suprême impensable, et « nous » avons imploré Ton secours. Et des profondeurs insondables, de l’Inconnu, la réponse est venue formidable et sublime ; et « nous » avons SU que la terre EST SA UVÉE .
Le 25 Septembre 1914
Écoutez | Prière |
Ô divine adorable Mère, avec Ton aide qu’y a‑t‑il
d’impossible ? L’heure des réalisations est proche
et Tu nous as assuré Ton concours pour accomplir
intégralement la suprême Volonté.
Tu nous as accueillis comme les bons intermédiaires
entre les Impensables réalités et les relativités
physiques, et Ta constante Présence parmi nous est
un gage de Ton active collaboration.
Le Seigneur a voulu, et Tu réalises ;
Une Lumière nouvelle poindra sur la terre.
Un monde nouveau naîtra.
Et les choses promises seront accomplies.
Le 28 Septembre 1914
Écoutez | Prière |
La plume est muette pour chanter Ta présence,
Seigneur, mais Tu es comme un roi qui a pris
entièrement possession de son royaume ; Tu organises,
classifies, développes et accrois chaque province,
Tu éveilles les endormies, rends actives celles qui
tendaient vers l’inertie, harmonises le tout, et un
jour viendra où cette harmonisation étant achevée,
la contrée entière, par sa vie même, sera Ton porteparole
et Ta manifestation.
Mais en attendant la plume est muette pour chanter
Tes louanges !
Le 30 Septembre 1914
Écoutez | Prière |
Seigneur, Tu as fait tomber les barrières de la pensée
et la réalisation est apparue dans toute son ampleur.
N’oublier aucun de ses points de vue, mener leur
accomplissement de front, sans en négliger aucun, ne
permettre à aucune limitation, à aucune restriction
d’intervenir sur la route, de retarder notre marche,
voilà ce que Tu nous aideras à faire dans Ta suprême
intervention. Et tous ceux qui sont Toi-même, Te
manifestant dans la perfection de quelque spéciale
activité, seront aussi nos collaborateurs, puisque telle
est Ta Volonté.
Notre Mère Divine est avec nous et nous a
promis l’identification avec la conscience suprême
et totale ; depuis les profondeurs insondables jusqu’au
monde sensoriel le plus extérieur. Et dans tous ces
domaines Agni nous assure le concours de sa flamme
purificatrice, détruisant les obstacles, embrasant les
énergies, stimulant les volontés, afin que la réalisation
soit hâtée. Indra est avec nous pour la perfection
de l’illumination dans la connaissance ; et le divin
Soma nous a transformés en son infini, souverain,
merveilleux amour, producteur des suprêmes
béatitudes…
Ô divine et douce Mère, je Te salue avec une
tendresse ineffable et recueillie, avec une confiance
sans limite.
Ô splendide Agni, Toi qui es si vivant en moi, je
T’appelle, je T’invoque pour que Tu sois plus vivant
encore, pour que Ton brasier se fasse plus immense,
Tes flammes plus puissantes et plus hautes, pour que
tout l’être ne soit plus qu’ardente combustion, bûcher
purificateur.
Ô Indra, je Te vénère et T’admire, je T’implore pour
que Tu T’unisses à moi, que Tu fasses définitivement
tomber toutes les barrières de la pensée, que Tu
m’octroies la divine connaissance.
Ô Toi, sublime Amour, à qui je n’avais jamais donné
d’autre nom, mais qui es si complètement l’essence
de mon être, Toi que je sens vibrer et vivre dans le
moindre de mes atomes comme dans l’univers infini
et au-delà, Toi qui T’exhales par tous les souffles, Te
trouves au centre de toutes les activités, rayonnes à
travers toutes les bonnes volontés, Te caches derrière
toutes les souffrances, Toi pour qui j’ai un culte sans
limite qui va toujours en s’intensifiant, permets que,
de plus en plus légitimement, je puisse me sentir
Toi-même intégralement.
Et Toi, Seigneur, qui es tout cela réuni et bien plus
encore, Toi souverain Maître, extrême limite de notre
pensée, qui Te tiens pour nous au seuil de l’Inconnu,
fais surgir de cet Impensable quelque splendeur
nouvelle, quelque possibilité de réalisation plus haute
et plus intégrale, afin que Ton oeuvre s’accomplisse
et que l’univers fasse un pas de plus vers la sublime
identification, la suprême manifestation.
Et maintenant ma plume se fait muette et je
T’adore en silence.
Le 5 Octobre 1914
Écoutez | Prière |
Dans le calme silence de Ta contemplation, divin
Maître, la Nature se retrempe et se fortifie. Dépassant
tout principe d’individualité, elle se plonge dans Ton
infinitude qui permet la réalisation de l’Unité dans
tous les domaines, sans désordre et sans confusion.
L’harmonieuse combinaison de ce qui conserve, de
ce qui progresse et de ce qui est éternellement, se
fait petit à petit dans un équilibre toujours plus
complexe, plus étendu et plus élevé. Et l’interéchange
des trois modes de vie permet la plénitude de Ta
manifestation.
Beaucoup Te cherchent à cette heure avec angoisse
et incertitude. Puissé-je être leur intermédiaire auprès
de Toi afin que Ta lumière les illumine et que Ta paix
les apaise…
L’être n’est plus qu’un point d’appui pour Ton
action, un centre pour Ta conscience.
Que sont devenus les limites et les obstacles ? Tu
es le souverain Seigneur de Ton royaume !
Le 7 Octobre 1914
Écoutez | Prière |
Oh que la lumière se répande sur la terre et que
la paix habite tous les coeurs !… Presque tous ne
connaissent que la vie matérielle, lourde, inerte,
conservatrice, obscure ; et leurs forces vitales sont
tellement attachées à cette forme physique d’existence,
que livrées à elles‑memes et hors du corps, elles
sont encore uniquement occupées des contingences
matérielles si douloureuses et harassantes pourtant…
Ceux en qui s’est éveillée la vie mentale sont inquiets,
tourmentés, agités, arbitraires, despotiques ; et pris
tout entiers dans le tourbillon des transformations
et des renouvellements qu’ils rêvent, ils sont prêts
à tout détruire sans savoir sur quoi s’appuyer pour
construire, et ainsi, avec leur lumière faite d’éclairs
aveuglants, ils augmentent encore la confusion, au
lieu de la faire cesser.
À tous il manque la paix invariable de Ta souveraine
contemplation, la calme vision de Ton éternité
immuable.
Et avec l’infinie gratitude de l’être individuel à
qui Tu as octroyé cette grâce insigne, je T’implore,
Seigneur, pour qu’à la faveur de la tourmente actuelle,
au sein de cette extrême confusion, le miracle
s’accomplisse, et que Ta loi de suprême Sérénité et
d’invariable et pure Lumière devienne perceptible
pour tous et gouverne la terre dans l’humanité enfin
éveillée à Ta conscience.
Ô doux Maître, Tu as entendu la prière et Tu
répondras à l’appel.
Le 14 Octobre 1914
Écoutez | Prière |
Ô Divine Mère, Tu es avec nous ; tous les jours
Tu m’en donnes l’assurance, et étroitement unies
dans une identification qui se fait de plus en plus
intégrale et constante, « nous » nous tournons vers
le Seigneur de l’univers et Cela qui est au-delà, dans
une grande aspiration vers les lumières nouvelles.
Toute la terre est dans nos bras comme un enfant
malade qu’il faut guérir et pour lequel on a, à cause
même de sa faiblesse, une tendresse toute spéciale. Et
bercées sur l’immensité des devenirs éternels, étant ces
devenirs mêmes, nous contemplons silencieusement
et joyeusement l’éternité du Silence immuable où tout
est réalisé dans la Conscience parfaite et l’Existence
inchangeable, porte merveilleuse de tout l’inconnu
qui est par-delà…
Alors le voile se déchire, la Gloire inexprimable
se découvre, et tout imprégnées de la Splendeur
indicible nous nous retournons vers le monde pour
lui apporter la Bonne Nouvelle.
_ _ _ _ _ _ _ _ _
Seigneur, Tu m’as donné le bonheur infini… Quel
être, quelle circonstance peut avoir le pouvoir de me
le retirer ?
Le 25 Octobre 1914
Écoutez | Prière |
Mon aspiration vers Toi, Seigneur, a pris la forme
d’une belle rose, harmonieuse, bien épanouie et
parfumée. Je Te la tends de mes deux bras dans un
geste d’offrande et Te demande : Si ma compréhension
est limitée, élargis-la ; si ma connaissance est obscure,
éclaire-la ; si mon coeur est sans ardeur, embrasele
; si mon amour est médiocre, intensifie-le ; si ma
sensation est ignorante et égoïste, donne-lui la pleine
conscience dans la Vérité ; et le « je » qui Te demande
ainsi, Seigneur, n’est pas une petite personne perdue
dans des milliers d’autres, c’est la terre entière qui
aspire vers Toi dans un élan plein de ferveur.
Et dans le silence parfait de la contemplation, tout
s’élargit jusqu’à l’infini ; et dans la paix parfaite du
silence, Tu parais dans la gloire resplendissante de
Ta lumière.
Le 8 Novembre 1914
Écoutez | Prière |
Pour la plénitude de la Lumière, nous T’invoquons,
Seigneur, fais que s’éveille en nous le pouvoir
d’expression…
Tout est muet dans l’être comme en une crypte
déserte ; mais au sein du silence et de l’ombre, brûle
la lampe qui ne s’éteint point, le feu de l’ardente
aspiration : Te connaître et Te vivre intégralement.
Les nuits suivent les jours, les aurores se succèdent
inlassablement, mais toujours monte la flamme
parfumée qu’aucun vent d’orage ne peut faire vaciller.
Elle monte de plus en plus ; un jour elle atteint la
voûte close encore, le dernier obstacle s’opposant à
l’union. Et la flamme est si pure, si droite et si fière
que l’obstacle se dissout soudain…
Alors Tu apparais dans toute Ta splendeur, dans
l’éblouissement de Ta gloire infinie ; la flamme à
Ton contact se change en colonne de lumière faisant
s’évanouir les ombres à jamais.
Et le Verbe jaillit, révélateur suprême !
Année : 1915
Le 15 Février 1915
Écoutez | Prière |
Seigneur de Vérité, par trois fois je T’ai invoqué avec
une grande ferveur, implorant Ta manifestation.
Puis selon son habitude, l’être intégral T’a fait
son entière soumission. À ce moment la conscience
a perçu l’être individuel, mental, vital et physique,
qui était entièrement recouvert de poussière et cet
être s’est prosterné devant Toi, le front touchant la
terre, poussière dans la poussière, en Te disant : « Ô
Seigneur, cet être fait de poussière se prosterne devant
Toi demandant à être consumé du feu de la Vérité afin
de ne plus manifester que Toi. » Alors Tu lui as dit :
« Lève-toi, tu es pur de toute poussière. » Et d’un seul
coup, subitement, toute la poussière s’est détachée
comme un manteau qui tombe à terre, et l’être parut
debout, tout aussi substantiel, mais resplendissant
d’une éblouissante lumière.
À bord du Kamo Maru. Le 3 Mars 1915
Écoutez | Prière |
C’est l’âpre solitude… et toujours cette forte
impression d’avoir été précipitée, tête baissée, dans
un enfer d’obscurité. À aucun moment de ma vie,
dans aucune circonstance, jamais il ne m’a semblé
vivre dans un milieu aussi totalement contraire à tout
ce dont j’ai conscience comme vrai, à tout ce qui est
l’essence même de ma vie. Parfois lorsque l’impression
et le contraste se font particulièrement intenses, je ne
puis éviter que la soumission intégrale se teinte de
mélancolie, et que le calme et muet colloque avec le
Maître intérieur se transforme pour un instant en
une invocation presque suppliante : « Qu’ai-je fait,
Seigneur, pour que Tu me jettes ainsi dans la sombre
nuit ? » Mais de suite, l’aspiration se fait plus ardente :
« É pargne à cet être toute défaillance, permets qu’il
soit l’instrument docile et clairvoyant de Ton oeuvre
quelle qu’elle soit. »
Pour le moment la clairvoyance manque : jamais
l’avenir ne fut plus voilé. Il semble que nous nous
avancions vers un mur haut et impénétrable pour tout
ce qui concerne les destinées individuelles. Quant aux
destinées nationales et terrestres, elles apparaissent
plus nettement. Mais de celles-là, il est inutile de
parler : l’avenir les révélera clairement aux yeux de
tous, même des plus aveugles.
Le 7 Mars 1915
Écoutez | Prière |
Il est passé le temps du doux silence mental, si paisible
et si pur, à travers lequel se faisait sentir la volonté
profonde qui s’exprimait dans sa toute-puissante
vérité. Maintenant la volonté ne se perçoit plus et
le mental redevenu nécessairement actif, analyse,
classe, juge, choisit, réagit constamment, comme
agent transformateur, sur tout ce qui s’impose à
l’individualité élargie au point d’être en rapport avec
un monde infiniment vaste, complexe et mélangé
d’ombre et de lumière comme tout ce qui appartient
à la terre. C’est l’exil hors de tous les bonheurs
spirituels, et, de toutes les épreuves, Seigneur, c’est
certes la plus douloureuse que Tu puisses imposer.
Surtout le retrait de la Volonté qui semble être
un signe de si totale désapprobation. Forte est
l’impression croissante du rejet ; il faut toute l’ardeur
d’une foi inlassable pour que la douleur n’envahisse
pas irrémédiablement la conscience extérieure ainsi
abandonnée à elle-même…
Mais elle ne veut pas désespérer, elle ne veut
pas croire au malheur irréparable ; elle attend avec
humilité, dans l’effort et la lutte obscurs et cachés, que
le souffle de Ta joie parfaite la pénètre à nouveau. Et,
peut-être, chacune de ses modestes et secrètes victoires
est-elle une aide véritable apportée à la terre…
S’il était possible de sortir définitivement de cette
conscience extérieure, de se réfugier dans la conscience
divine… Mais cela Tu l’as interdit, et Tu l’interdis
constamment : pas de fuite hors du monde ; le fardeau
d’ombre et de laideur doit être porté jusqu’au bout,
même si l’aide divine semble s’être retirée ; au sein de
la nuit il faut rester et marcher, même sans boussole,
sans phare, sans guide intérieurs…
Je ne veux même pas implorer Ta miséricorde,
car ce que Tu veux pour moi, je le veux aussi ; et
toute mon énergie se tend uniquement pour avancer,
avancer toujours, un pas après l’autre, malgré la
profondeur des ténèbres et les obstacles du chemin ;
quoiqu’il arrive, Seigneur, c’est avec un amour fervent
et invariable que Ta décision sera accueillie. Et même
si Tu as trouvé l’instrument impropre à Te servir,
l’instrument ne s’appartient plus, il est Tien… Tu
peux le détruire ou le magnifier ; mais lui n’existe pas
en lui-même et ne veut et ne peut rien sans Toi…
Le 8 Mars 1915
Écoutez | Prière |
D’une façon générale, l’état est celui d’une calme
et profonde indifférence ; l’être n’éprouve ni désir ni
répulsion, ni enthousiasme ni dépression, ni joie ni
peine. Il regarde la vie comme un spectacle auquel
il ne prendrait que la plus petite part ; il perçoit les
actions et les réactions, les conflits de forces, comme
à la fois appartenant à son être qui déborde de toutes
parts la petite individualité passagère, et tout à fait
étrangers à cette individualité.
Mais de temps en temps un grand souffle passe, un
grand souffle fait de douleur, d’angoissant isolement,
de pauvreté spirituelle ; on dirait l’appel désespéré de
la terre abandonnée par le Divin… et c’est une peine
silencieuse autant que cruelle, soumise, sans révolte,
une peine sans désir de l’éviter ou d’en sortir et pleine
d’une infinie douceur où se joignent étroitement la
souffrance et la félicité ; quelque chose d’infiniment
vaste, grand, profond ; trop grand et trop profond
peut-être pour être compris des hommes… quelque
chose qui contient le germe de demain…
Année : 1916
Le 26 Décembre 1916
Écoutez | Prière |
Toujours la parole que Tu me fais entendre dans le
silence est encourageante et douce, Seigneur. Mais je
ne puis voir en quoi cet instrument est digne de la
grâce que Tu lui fais, ni comment il sera capable de
réaliser ce que Tu attends de lui. Tout en lui paraît
si petit, si faible, si quelconque, sans intensité, sans
force et sans ampleur, en comparaison de ce qu’il
devrait être pour pouvoir endosser ce rôle écrasant.
Mais je sais que ce que le mental pense est de peu
d’importance ; il le sait lui-même et attend, passif, le
développement de Ton décret.
Tu me dis de lutter sans cesse : je voudrais avoir cette
ardeur indomptable qui a raison de toute difficulté.
Mais Tu as mis dans mon coeur une paix si souriante,
que je crains de ne savoir même plus lutter… Les
choses (facultés et activités) se développent en moi
comme les fleurs s’épanouissent, spontanément et sans
effort, dans la joie d’être et de croître, la joie de Te
manifester quel que soit le mode de Ta manifestation.
Et s’il y a lutte, elle est si facile et si douce qu’on ne
peut guère lui donner ce nom. Mais que ce coeur
est petit pour contenir tant d’amour ! Et que cet
être vital et physique est faible pour le bien pouvoir
distribuer ! Ainsi Tu m’a placée au seuil de la voie
merveilleuse, mais mes pieds auront-ils la force de me
faire avancer sur elle ?… Tu me réponds que je plane
et que j’aurais tort de vouloir marcher… Ô Seigneur,
que Ta miséricorde est infinie ! Une fois encore Tu
m’as prise dans Tes bras tout-puissants et Tu m’as
bercée sur Ton coeur insondable, et ce coeur m’a dit :
« N e te tourmente point, sois confiante comme un
enfant : n’es-tu point moi-même cristallisé pour mon
oeuvre ?… »
Le 27 Décembre 1916
Écoutez | Prière |
Ô mon bien-aimé Seigneur, ce coeur est incliné
devant Toi et ces bras se tendent vers Toi, implorant
que Tu veuilles bien embraser cet être tout entier
de Ton sublime amour, afin qu’il puisse rayonner
sur le monde. Mon coeur est grand ouvert dans
ma poitrine, il est ouvert et tourné vers Toi, il est
ouvert et vide afin que Tu puisses le remplir de Ton
amour divin ; il est vide de toute autre chose que
Toi, et Ta présence l’emplissant tout entier le laisse
vide pourtant, puisqu’il peut contenir encore toute
l’infinie variété du monde manifesté.
Ô Seigneur, ces bras se tendent suppliants vers Toi
et ce coeur est largement ouvert devant Toi pour que
Tu en fasses le réservoir de Ton amour infini.
« A ime-moi en toute chose, partout et en tout
être, » telle fut Ta réponse. En me prosternant je Te
demande de m’en donner le pouvoir…
Année : 1917
Le 30 Mars 1917
Écoutez
Prière
Il y a une royauté souveraine à ne point s’occuper
de soi. Avoir des besoins, c’est affirmer sa faiblesse ;
réclamer quelque chose prouve que l’on manque
de cette chose. Désirer, c’est être impuissant, c’est
reconnaître ses limites, avouer son incapacité à les
surmonter.
Sans autre point de vue que celui d’une légitime
fierté, l’homme, par noblesse, devrait renoncer à
tout désir. Quelle humiliation de demander quelque
chose pour soi-même à la Vie et à la Conscience
Suprême qui l’anime. Quelle humiliation pour nous,
quelle offensante ignorance pour Elle. Car tout est
à notre portée et seules les limites égoïstes de notre
être nous empêchent de jouir de tout l’univers, aussi
complètement et concrètement que de notre propre
corps et de son entourage immédiat.
Telle devrait être aussi l’attitude vis-à-vis des
moyens d’action.
Toi qui résides dans mon coeur et diriges tout par
Ta suprême Volonté, Tu m’as dit, il y a un an, de
couper tous les ponts et de me jeter tête baissée dans
l’Inconnu, comme César lorsqu’il franchit le Rubicon :
c’était le Capitole ou la Roche Tarpéienne.
Tu celas à mes yeux le résultat de l’acte. Encore
maintenant Tu le maintiens secret ; et pourtant Tu
sais que mon égalité d’âme reste la même devant la
grandeur ou bien la misère.
Tu voulus que pour moi l’avenir fût incertain,
et que j’avance avec confiance sans même savoir où
mènera la route.
Tu voulus que je m’en remette entièrement à Toi
du soin de mon destin et que j’abdique totalement
toute préoccupation personnelle.
C’est sans doute que mon chemin doit être vierge
même pour ma pensée.
Écoutez | Prière |
Il y a une royauté souveraine à ne point s’occuper
de soi. Avoir des besoins, c’est affirmer sa faiblesse ;
réclamer quelque chose prouve que l’on manque
de cette chose. Désirer, c’est être impuissant, c’est
reconnaître ses limites, avouer son incapacité à les
surmonter.
Sans autre point de vue que celui d’une légitime
fierté, l’homme, par noblesse, devrait renoncer à
tout désir. Quelle humiliation de demander quelque
chose pour soi-même à la Vie et à la Conscience
Suprême qui l’anime. Quelle humiliation pour nous,
quelle offensante ignorance pour Elle. Car tout est
à notre portée et seules les limites égoïstes de notre
être nous empêchent de jouir de tout l’univers, aussi
complètement et concrètement que de notre propre
corps et de son entourage immédiat.
Telle devrait être aussi l’attitude vis-à-vis des
moyens d’action.
Toi qui résides dans mon coeur et diriges tout par
Ta suprême Volonté, Tu m’as dit, il y a un an, de
couper tous les ponts et de me jeter tête baissée dans
l’Inconnu, comme César lorsqu’il franchit le Rubicon :
c’était le Capitole ou la Roche Tarpéienne.
Tu celas à mes yeux le résultat de l’acte. Encore
maintenant Tu le maintiens secret ; et pourtant Tu
sais que mon égalité d’âme reste la même devant la
grandeur ou bien la misère.
Tu voulus que pour moi l’avenir fût incertain,
et que j’avance avec confiance sans même savoir où
mènera la route.
Tu voulus que je m’en remette entièrement à Toi
du soin de mon destin et que j’abdique totalement
toute préoccupation personnelle.
C’est sans doute que mon chemin doit être vierge
même pour ma pensée.
Le 31 Mars 1917
Écoutez | Prière |
Chaque fois qu’un coeur tressaille à Ton souffle divin
un peu plus de beauté semble née sur la terre, l’air
s’embaume d’un doux parfum, tout devient plus
amical.
Quelle puissance est la Tienne, Ô Seigneur de
tout être, qu’un atome de Ta joie suffise à effacer
tant d’ombres et de douleurs, qu’un rayon de Ta
gloire puisse ainsi éclairer le caillou le plus terne, la
conscience la plus noire.
Tu m’as comblée de Tes faveurs, Tu m’as dévoilé
bien des secrets, Tu m’as fait goûter bien des joies
inattendues, inespérées, mais aucune de Tes grâces ne
peut égaler celle que Tu m’octroies quand un coeur
tressaille à Ton souffle divin…
À ces heures bénies la terre tout entière chante un
hymne d’allégresse, l’herbe frissonne de plaisir, l’air
vibre de lumière, les arbres dressent vers le ciel leur
prière plus ardente, le chant des oiseaux devient un
cantique, les vagues de la mer se gonflent d’amour,
le sourire des enfants raconte l’infini, les âmes des
hommes apparaissent dans leurs yeux.
Dis-moi : m’accorderas-Tu le pouvoir merveilleux
de faire naître cette aurore dans les coeurs attentifs,
d’éveiller les consciences à Ta sublime Présence,
dans ce monde si triste et si démantelé de susciter
un peu de Ton vrai Paradis ? Quels bonheurs, quelles
richesses, quelles puissances terrestres peuvent égaler
ce don souverain ?…
Ô Seigneur, jamais en vain je ne T’ai imploré, car
c’est Toi-même en moi qui Te parles à Toi-même…
Goutte à goutte Tu laisses tomber en une pluie
fécondante la flamme vivante et rédemptrice de Ton
amour tout-puissant. Lorsque ces gouttes de lumière
éternelle tombent doucement sur notre monde
d’obscure ignorance, on dirait qu’une à une pleuvent
sur la terre les étoiles dorées du sombre firmament.
Et tout s’agenouille en muette dévotion devant ce
miracle toujours renouvelé.
Le 7 Avril 1917
Écoutez | Prière |
Une grande concentration s’est emparée de moi et je
me suis aperçue que je m’identifiais avec une fleur de
cerisier ; puis à travers cette fleur avec toutes les fleurs
de cerisier ; puis descendant plus profondément dans
la conscience, en suivant un courant de force bleutée,
je devins tout à coup le cerisier lui-même, dressant
vers le ciel, comme autant de bras, ses innombrables
branches chargées de leur offrande fleurie. J’entendis
alors distinctement la phrase suivante :
« A insi tu t’es unie à l’âme des cerisiers et tu as pu
de la sorte constater que c’est le Divin qui fait au ciel
l’offrande de Prière de fleurs. »
Lorsque je l’eus écrit, tout s’effaça ; mais maintenant
le sang du cerisier coule dans mes veines, et avec lui
une paix et une force incomparables ; quelle différence
y a-t-il entre le corps humain et le corps d’un arbre ?
Aucune vraiment, et la conscience qui les anime est
bien identiquement la même.
Puis le cerisier m’a glissé à l’oreille :
« C’est dans la fleur de cerisier qu’est le remède des
maladies de printemps. »
Le 28 Avril 1917
Écoutez | Prière |
Ô mon divin Maître, Toi qui m’es apparu ce soir
dans toute Ta rayonnante splendeur, Tu peux en un
instant rendre cet être-ci parfaitement pur, lumineux,
translucide, conscient, Tu peux le libérer de ses
dernières taches d’ombre, Tu peux le délivrer de ses
dernières préférences, Tu peux… mais ne l’as‑T u
point fait ce soir, lorsque Tu le pénétras de Tes effluves
divins et de Ton inexprimable clarté ? Peut-être…
car en moi est une Force surhumaine toute faite de
calme et d’immensité. Permets que de cette cime
je ne retombe point et que toujours la Paix règne
en maître dans mon être ; non pas seulement dans
les profondeurs dont elle est souveraine depuis fort
longtemps, mais dans les moindres activités du dehors,
dans les moindres replis du coeur et de l’action.
Je Te salue, Seigneur, Libérateur des êtres !
« T enez voici des fleurs et des bénédictions ; voici les
sourires de l’amour divin ; il est sans préférence et sans
répulsion… Il s’écoule vers tous en un flot généreux,
et ne reprend jamais ses dons merveilleux. »
Et les bras étendus en un geste d’extase, la Mère
éternelle déverse sur le monde la rosée incessante de
son plus pur amour…
Tokyo. Le 24 Septembre 1917
Écoutez | Prière |
Tu m’as soumise à une dure discipline ; degré après
degré, j’ai gravi l’échelle qui mène jusqu’à Toi ; et, au
sommet de l’ascension, Tu m’as fait goûter les joies
parfaites de l’Identification. Puis, obéissant à Ton
ordre, degré après degré, je suis redescendue vers
les activités et les consciences extérieures, rentrant
en contact avec ces mondes que j’avais quittés pour
Te découvrir. Et maintenant que je suis redescendue
jusqu’en bas de l’échelle, tout est si terne, si médiocre,
si neutre, en moi et autour de moi, que je ne
comprends plus…
Qu’attends-Tu donc de moi ; et à quoi servait cette
lente et longue préparation, si c’est pour aboutir à un
résultat que la majorité des êtres humains atteignent
sans avoir été soumis à aucune discipline ?
Comment se peut-il, qu’après avoir vu tout ce que
j’ai vu, expérimenté tout ce que j’ai expérimenté,
après avoir été menée jusqu’au sanctuaire le plus sacré
de Ta Connaissance et de Ta Communion, Tu fasses
de moi un instrument aussi complètement banal
dans des circonstances aussi ordinaires ? Vraiment,
Seigneur, Tes fins sont insondables et dépassent mon
entendement…
Pourquoi aussi, alors que Tu as déposé dans mon
coeur le pur diamant de Ta parfaite Félicité, permets-
Tu à la surface de refléter les ombres qui viennent du
dehors, et ainsi de laisser insoupçonné et il semble,
inefficace, le trésor de Paix que Tu m’as octroyé ? En
vérité tout cela est bien mystérieux et confond ma
compréhension.
Pourquoi, m’ayant donné ce grand silence intérieur,
permets-Tu à la langue de tant s’exercer et à la pensée
de s’occuper de si futiles choses ? Pourquoi ?… Je
pourrais indéfiniment questionner, et probablement
toujours en vain.
Je n’ai qu’à m’incliner devant Ton décret et à
accepter sans mot dire ma condition.
Je ne suis plus qu’un spectateur regardant le dragon
du monde dérouler ses anneaux sans fin.
Le 15 Octobre 1917
Écoutez | Prière |
J’ai crié vers Toi, Seigneur, dans mon désespoir et Tu
as répondu à mon appel.
J’aurais tort de me plaindre des circonstances de
mon existence, ne sont-elles point conformes à ce
que je suis ?
Parce que Tu m’as menée jusqu’au seuil de Ta
splendeur et que Tu m’as fait jouir de Ton harmonie,
je pensais avoir atteint le but ; mais à vrai dire Tu
as regardé l’instrument dans la pleine clarté de Ta
Lumière et Tu l’as replongé dans le creuset du monde,
afin qu’il soit à nouveau refondu et purifié.
À ces heures d’extrême et angoissée aspiration, je
me sens, je me vois entraînée par Toi avec une rapidité
vertigineuse sur le chemin de la Transformation et
tout l’être vibre du conscient contact avec l’Infini.
C’est ainsi que Tu me donnes la patience et la force
afin de surmonter la nouvelle épreuve.
Le 25 Novembre 1917
Écoutez | Prière |
Ô Seigneur, à une heure de cruelle détresse, parce que
dans la sincérité de ma foi j’ai dit : « Que Ta volonté
soit faite », Tu es venu revêtu de Ta gloire. À Tes pieds
alors je me suis prosternée, puis sur Ton sein j’ai
trouvé abri. Tu as rempli mon être de Ta divine clarté
et Tu l’as inondé de Ta félicité. Tu m’as réaffirmé Ton
alliance et m’as assuré de Ta constante Présence. Tu
es l’ami sûr qui ne faillit point, le Pouvoir, le Soutien
et le Guide. Tu es la Lumière qui dissipe les ténèbres
et le Conquérant qui assure la victoire. Depuis que
Tu es là, tout s’est clarifié ; dans mon coeur affermi,
Agni s’est rallumé ; et sa splendeur rayonne embrasant
l’atmosphère en la purifiant…
Mon amour pour Toi, si longtemps comprimé, a
jailli de nouveau, puissant, irrésistible, souverainement
décuplé par l’épreuve subie. Il a trouvé la force dans la
réclusion, la force d’émerger à la surface de l’être, de
s’imposer en maître à la conscience entière, d’engloutir
toute chose en son flot débordant…
Tu m’as dit : « Je reviens pour ne plus te
quitter. »
Et le front sur le sol, j’ai reçu Ta promesse.
Année : 1918
Le 12 Juillet 1918
Écoutez | Prière |
Soudain, devant Toi, toute ma fierté est tombée.
J’ai compris à quel point, devant Toi, il était futile
de vouloir se surmonter soi-même… et j’ai pleuré,
j’ai pleuré abondamment, sans contrainte, les plus
douces larmes de ma vie… Ah oui, comme elles furent
reposantes, calmantes et douces, ces larmes que j’ai
versées devant Toi sans honte ni contrainte ! Était-ce
comme une enfant dans les bras de son père ? Mais quel
Père ! Quelle sublimité, quelle magnificence, quelle
immensité de compréhension ! Et quelle puissance,
quelle plénitude dans la réponse ! Oui, ces pleurs
étaient comme une rosée sainte. Est-ce parce que ce
n’était point sur ma propre peine que je pleurais ? Ah,
quelles douces, quelles bienfaisantes larmes qui ont
ouvert mon coeur sans contrainte devant Toi, ont fait
fondre en un miraculeux instant tout ce qui restait
d’obstacles pouvant me séparer de Toi !
Peu de jours auparavant j’avais su, j’avais entendu :
« S i tu pleures sans contrainte et sans fard devant
Moi, bien des choses changeront, une grande victoire
sera gagnée. » Et c’est pourquoi lorsque les larmes
sont montées de mon coeur vers mes yeux, je suis
venue m’asseoir devant Toi pour les laisser couler en
offrande, pieusement. Et que l’offrande fut douce et
réconfortante !
Et maintenant, encore que je ne pleure plus, je
Te sens si proche, si proche que tout mon être en
frémit de joie.
Laisse-moi balbutier mon hommage :
Dans ma joie d’enfant j’ai crié vers Toi :
Ô Toi, le Suprême, l’Unique Confident qui sais
d’avance tout ce qu’on Te dira, puisque Tu en es
l’auteur.
Ô Toi, le Suprême, l’Unique Ami qui nous acceptes
et nous aimes et nous comprends tels que nous
sommes, puisque c’est Toi-même qui nous fis ainsi.
Ô Toi, le Suprême, l’Unique Guide qui ne
contredis jamais notre volonté supérieure, puisque
c’est Toi‑meme qui veux en elle, ce serait folie de
chercher ailleurs qu’en Toi à être écouté, compris,
aimé, guidé, puisque Tu es toujours là pour le faire
et que Tu ne nous failliras jamais.
Tu m’as fait connaître les joies suprêmes, les joies
sublimes de la parfaite confiance, de la pleine sécurité,
du total abandon sans réserve ni fard, sans effort ni
contrainte.
Et joyeuse comme une enfant, j’ai souri et pleuré
à la fois devant Toi, ô mon Bien-Aimé…
Année : 1919
Oiwaké. Le 3 Septembre 1919
Écoutez | Prière |
Comme l’homme n’a pas voulu du repas que j’avais
préparé avec tant d’amour et de soin, alors j’ai invité
le Dieu à le prendre.
Et mon Dieu, Tu as accepté mon invitation et
Tu es venu T’asseoir à ma table ; et en échange
de ma pauvre et humble offrande Tu m’as octroyé
la finale libération ! Mon coeur si lourd encore ce
matin d’angoisse et de souci, ma tête si surchargée
de responsabilité, ont été délivrés de leur fardeau.
Ils sont légers et joyeux maintenant comme depuis
longtemps l’était mon être intérieur. Et mon corps
Te sourit de bonheur comme auparavant Te souriait
mon âme !
Et dès lors, n’est-ce pas ? Tu ne me la retireras plus
cette Joie, ô mon Dieu ; car cette fois, je pense, la
leçon a suffi et j’ai gravi le calvaire des successives
déceptions assez haut pour atteindre à la Résurrection !
Il ne me reste plus de tout ce passé qu’un formidable
amour qui me donne le coeur pur d’un enfant et la
pensée légère et libre d’un dieu.
Année : 1920
Pondichéry. Le 22 Juin 1920
Écoutez | Prière |
Après m’avoir octroyé la joie dépassant toute expression, ô mon Seigneur bien-aimé, Tu m’as envoyé l’épreuve, la lutte, et je lui ai souri à elle aussi, comme à l’un de Tes précieux messagers. Autrefois je redoutais le conflit, il froissait en moi l’amour de la paix et de l’harmonie. Mais maintenant, ô mon Dieu, je l’accueille avec joie : il est une des formes de Ton action, un des meilleurs moyens pour remettre en lumière des éléments de l’oeuvre qui autrement eussent pu être oubliés ; il apporte avec lui une perception d’ampleur, de complexité et de puissance. Et de même que je T’ai vu, resplendissant, susciter le conflit, de même c’est Toi aussi que je vois débrouiller l’enchevêtrement des événements et des tendances contradictoires, et finalement remporter la victoire sur tout ce qui s’essaie à voiler Ta Lumière et Ta Puissance ; car de tout cela, c’est une plus parfaite réalisation de Toi-même qui doit surgir.
Année : 1931
Le 24 Novembre 1931
Écoutez | Prière |
Ô mon Seigneur, mon doux Maître, pour accomplir
Ton OEuvre j’ai sombré dans les profondeurs
insondables de la matière, j’ai touché du doigt
l’horreur de l’inconscience et du mensonge — lieu
d’oubli, obscurité suprême ! Mais dans mon coeur
était le Souvenir, et de mon coeur jaillit l’appel qui
parvint jusqu’à Toi : « S eigneur, Seigneur, Tes ennemis
semblent triompher de toute part ; le mensonge est
le souverain du monde ; la vie sans Toi est une mort,
un enfer perpétuel ; le doute y a pris la place de
l’Espérance et la révolte celle de la Soumission ; la
Foi y est tarie, la Gratitude n’est pas née ; les passions
aveugles, les instincts meurtriers, la faiblesse coupable
ont voilé, étouffé Ta douce loi d’Amour. Seigneur,
permettras-Tu à Tes ennemis, le mensonge, la laideur,
la souffrance, de triompher ? Seigneur, donne l’ordre
de vaincre et la Victoire se produira. Je sais que nous
sommes indignes, je sais que le monde n’est pas prêt.
Mais je crie vers Toi dans ma foi absolue en Ta Grâce
et je sais que Ta Grâce nous sauvera. »
Ainsi, ma prière s’élança vers Toi ; et des profondeurs
de l’abîme, je Te vis dans Ta rayonnante splendeur ;
Tu parus et Tu dis : « N e perds pas courage, sois ferme
et confiante : JE VIENS . »
Année : 1937
Le 23 Octobre 1937
Écoutez | Prière |